INTERVIEW DE MONSEIGNEUR RAFFIN : "FAISONS CONFIANCE AU NOUVEAU PAPE

Publié le par paroisses Sante Agathe

mgr raffin  Un point-presse s’est tenu à l’évêché de Metz le 14 mars 2013 suite à l’élection du Cardinal Jorge Mario Bergoglio comme nouveau pape. Interview avec Monseigneur Raffin, évêque de Metz.
 
Que pensez-vous du choix du Cardinal Jorge Mario Bergoglio comme nouveau pape ?

C’est un très bon choix. On a osé faire appel à un non-européen. Jusque maintenant, il n’y avait pas eu de pape latino-américain et jamais de Jésuite. C’est une première. Faisons confiance !
Je confirme tout le bien qu’on a dit de lui dans les médias et dans différents journaux. Cela remonte à plusieurs années et il n’a pas changé. C’est un homme simple, profond et proche des gens.

Que pensez-vous de sa première apparition publique à la loggia de Saint-Pierre ?

C’était très bien. Cela m’a beaucoup plu. Il est important que la prière soit au cœur de la vie de l’Eglise et elle l’est déjà.

Que pensez-vous du choix du nom de François ?

Jusqu’à présent, il n’y a pas de confidence qui ont filtré sur les raisons de ce choix et nous pouvons nous interroger sur le saint choisi. Ce peut être saint François d’Assise, saint François-Xavier qui était jésuite comme le nouveau pape ou encore saint François de Sales, qui était un grand évêque.

S’il a choisi saint François d’Assise, c’est intéressant. Des médias ont dit qu’il a choisi François d’Assise car il est proche des pauvres. Mais ce n’est pas cela l’essentiel. François d’Assise a voulu retourner à l’évangile et réformer l’Eglise par un retour radical à l’évangile, en vivant, selon son expression, « un évangile sans glose », sans en atténuer les aspérités. Si le choix est celui de saint François d’Assise – mais j’en attends confirmation –, c’est aussi un très beau choix qui plaira aux Italiens car François d’Assise est patron de l’Italie et il est connu partout dans le monde.
Ce choix est aussi un peu surprenant pour un jésuite, d’autant que saint François-Xavier était jésuite.
 
Quant à saint François de Sales, ce fut un grand évêque du XVIIe siècle, qui a beaucoup écrit. Il a notamment donné une formation spirituelle aux laïcs qu’il nous a laissée dans un ouvrage intitulé, selon le langage de l’époque, Introduction à la vie dévote. C’était la première fois que dans la littérature chrétienne, un traité de spiritualité était destiné aux laïcs.

Pensez-vous que ce nouveau pape peut changer les choses ?

Je ne sais pas. Je pense que dans les congrégations, les cardinaux ont fait part de leur desideratas, comme la réforme de l’Eglise. Je pense qu’ils ont désigné l’homme capable de faire ce travail. Attendons.

Quels changements pourrait entreprendre le pape François ?

Appliquer le concile Vatican II tout simplement. Au moment de la commémoration des 50 ans de l’ouverture de ce concile, on a souvent dit, et moi-même aussi, que Vatican II reste un objectif à atteindre, pas encore pleinement accompli, avec une nouvelle articulation entre [les églises locales] et le pouvoir central de l’Eglise, qui est absolument indispensable. A contrario, les églises orthodoxes n’ont pas de principe d’unité et elles sont si différentes les unes des autres qu’elles nous envient ce pouvoir central, absolument indispensable pour maintenir la communion. Mais de là à ce que le pouvoir central [romain] intervienne dans les églises locales, il y a un pas. Nous n’avons pas à recourir à Rome pour des broutilles. C’est important qu’il y ait une forme de décentralisation tout en gardant une unité profonde dans la communion dans une même foi. C’est l’application plénière de la constitution sur l’Eglise Lumen Gentium.
 
Il y a église locale et église locale. Toutes ne sont pas au même niveau. Par exemple la Conférence des Evêques de France bénéficie d’une certaine autonomie et crédibilité par rapport au pouvoir central, alors que l’Eglise d’Afrique est encore beaucoup sous la coupe de Rome.
De plus, il y a tout un travail d’inculturation à faire. Pour l’Eglise latine, les liturgies sont fabriquées à Rome en latin et traduites ensuite dans différentes langues. En soi, ce n’est pas un mauvais principe. A l’usage, on s’aperçoit que ce n’est pas seulement une traduction à faire. Si vous allez à la messe à Rome, à Paris ou en Afrique, il ne se passe pas la même chose. Il y a encore beaucoup à faire sur l’expression liturgique.

Peut-on attendre des réformes au niveau de la Curie ?

Il faut savoir que pendant le concile Vatican II, on a tiré à boulet rouge sur les cardinaux italiens. Avec le pape Paul VI, la Curie s’est internationalisée et le monde entier est venu pour diriger la Curie. Au bout de plusieurs années, il a été constaté qu’elle ne fonctionnait pas mieux et les cardinaux italiens, qui étaient fermes sur le principe et souples dans l’application, ont été regrettés.

A mon avis, il manque un mode de fonctionnement à la Curie. Si on prend un Etat comme la France, les ministres se rencontrent régulièrement et je suppose que leur rôle est de viser une convergence des ministères et une mise en forme d’orientations communes. Je ne dis pas que cela fonctionne parfaitement, mais au moins une structure est prévue. Or, à la Curie romaine, il n’y a pas d’organisation de ce type. De temps en temps, les préfets des congrégations se réunissent autour du Cardinal Secrétaire d’Etat. Mais il n’y a pas de périodicité fixée par le droit canon et c’est au gré du Secrétaire d’Etat.
De plus, chaque Congrégation est un peu isolée, sans qu’il y ait de vision commune, d’où la possibilité de couacs. Cela fait que certains, comme le Conseil Pontifical Justice & Paix, publient des textes intéressants et utiles, mais sans qu’il n’y ait de réflexion commune.

Peut-on attendre que l’Eglise parle davantage de la doctrine sociale ?

La doctrine sociale est claire et ferme. Toute la question est de l’appliquer dans les diverses circonstances particulières et dans les différents pays. Il est important que les Conférences épiscopales locales puissent s’exprimer sur ces questions car il y a des différences de terrain. Les principes restent les mêmes mais les applications locales varient. C’est aussi une question de maturité des églises locales.

Que vont devenir les conclusions du Synode sur la Nouvelle Evangélisation ?

J’espère que cela ne restera pas dans les cartons et que le nouveau pape va les mettre en route. Quand Paul VI est mort en 1978, il y avait dans les cartons un synode sur la catéchèse. Jean-Paul II l’a mis en musique et ça s’est plutôt bien passé. Il y a certainement d’autres chantiers de Benoît XVI qui devront également être continués par le pape François.

A noter :
Le 18 mars, à 18h, à la cathédrale de Metz, Monseigneur Raffin présidera une célébration (non eucharistique) d’action de grâce pour l’élection du nouveau pape François.

 

 

 

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